À tombeau ouvert au Guyana
-EXTRAIT-
Le bac est le seul moyen légal pour débarquer au Guyana par le fleuve. Il n’y en a qu’un par jour, tôt le matin. Il ne faut donc pas le rater. Le passage du Corenthyne est rendu délicat par les rapports tendus qu’entretiennent le Guyana et le Surinam. Il arrive parfois que des vedettes surinamiennes se postent au milieu du fleuve pour en interdire son franchissement. En parallèle, des speed boats proposent bien la traversée en un temps record, à tout horaire, mais ils ont une très mauvaise réputation. Si le passage à la douane n’est pas dans leur programme, la sécurité non plus. En revanche, la possibilité de vous dévaliser est une option plus qu’envisageable. Environ 80 personnes préfèrent donc emprunter quotidiennement le bac. Quand ce ne sont pas les militaires qui entravent le passage, c’est la mécanique antédiluvienne de son caboteur qui fait régulièrement défaut. On comprend vite pourquoi quand celui-ci s’ébroue péniblement dans un nuage noir et un vacarme assourdissant, s’arrachant péniblement au quai, avant de lutter pendant trois bons quarts d’heure avec les courants du fleuve. Dans ces conditions, atteindre la rive opposée semble à chaque fois un véritable exploit. On se retrouve alors autant étonné que soulagé d’y être parvenu.
À la sortie de la douane, c’est la cohue. Étienne, Jean-François et Nathalie sont pris d’assaut par les chauffeurs de taxi. Ils doivent trouver le leur. D’après le message de Kit, il se nomme Kustom. Jean-François demande à la foule qui est Kustom. Une forêt de mains se lève. Tous sont Kustom !
Étienne, Jean-François et Nathalie arrivent à Skeldon. Les douaniers se montrent très sympathiques, mais le passage à la douane prendra un temps infini. Cette arrivée au Guyana donnera l’impression d’un long parcours collant dans la glaise, enlisés, jusqu’à la délivrance. À la sortie de la douane, c’est la cohue. Étienne, Jean-François et Nathalie sont pris d’assaut par les chauffeurs de taxi. Ils doivent trouver le leur. D’après le message de Kit, il se nomme Kustom. Jean-François demande à la foule qui est Kustom. Une forêt de mains se lève. Tous sont Kustom ! Ce dernier arrive, poussant la meute. D’une voix rauque et énergique, il s’impose par un « non, c’est moi ». Ancien douanier (d’où son surnom), il s’est fait écraser le dos entre deux containers. Obligé de changer de travail, il s’est reconverti en chauffeur. Étienne dira de lui : « Filou, mais fiable ». Avant de rejoindre Georgetown, Kustom les emmène au comptoir de change. Moment délicat, a priori. Mais l’aura de Kit se fait déjà sentir. Alors que Kustom les accompagne au comptoir, le simple fait d’évoquer qu’il les amène chez elle provoque la décomposition des visages. Le taux de change sera de ce fait local et rapide. Arrivés dans la banlieue de Georgetown, Kustom entame une visite guidée très surprenante. Le taxi fait la tournée des boîtes aux lettres. Nos voyageurs apprendront très vite qu’il dépose l’argent de la semaine à toutes ses maîtresses. En pleine ville, le taxi évite de justesse un accident. Un autre taxi leur fait une queue de poisson, et Kustom manque d’emboutir un camion.
Carnet de voyage au Guyana d’Étienne & Émilie Druon à découvrir dans Numéro 59.
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