CULTURE VOYAGE – Bouts du monde n°58 – Hiver 2024

Depuis Bouts du monde numéro 58, une nouvelle rubrique Culture voyage s’est glissée dans la revue. Ce rendez-vous trimestriel sélectionne des actualités liées au voyage qui vous auraient, peut-être, échappé. Des thématiques diversifiées qui prennent le pouls de la planète.

Terres de feux

Les incendies qui ravagent la Patagonie nous rappellent les flammes qui avaient noirci le carnet de voyage d’Étienne Druon sur l’Équateur dans Bouts du monde Numéro 54. Depuis le mois de janvier, le parc national argentin de Los Alerces, reconnu au patrimoine mondial par l’Unesco en 2017, est en proie à des flammes dévastatrices. Un énième feu de forêt dans la province de Chubut dans lequel le dérèglement climatique a, évidemment, sa part de responsabilité. Mais ce n’est pas le seul à blâmer. Dans les années 1970, un projet de reforestation de la Patagonie a vu le jour, introduisant le  pin de Monterey, espèce hautement inflammable, sur le territoire. Selon le géographe Carlos Reboratti, cité par le site notre-planete. info, ces phénomènes ne sont pas nouveaux, même s’il s’accentuent. « L’histoire de la Patagonie est une histoire d’incendies naturels car sa végétation coexiste avec le feu, comme cela se produit avec de nombreuses autres végétations de climats humides. »

Monstre des mers

Vingt ponts empilés les uns au-dessus des autres, ce n’est plus un bateau, ce sont des lasagnes. L’Icon of the Seas et ses 365 mètres de long est entré en service début 2024. Une patinoire, un parc aquatique et même une cascade de dix-sept mètres de haut attendent les croisiéristes. Il manque juste un centre équestre et une piste de ski, mais ne l’écrivons pas trop fort, cela pourrait donner des idées aux armateurs. Quel genre de carnet de voyage ces monstres des mers pourraient-ils inspirer ? Un plaisir coupable nous pousse rait à aller voir cette folie de plus près, mais on se rappelle le naufrage écologique que causent ces navires monstrueux. Pourtant vantée comme une avancé dans la « stratégie de carburants alternatifs », l’utilisation du gaz naturel liquéfié (GNL) pour alimenter les moteurs de l’Icon of the Seas est loin d’avoir suscité l’engouement général. La combustion de ce carburant génère du méthane, gaz à effet de serre notable, tout aussi responsable du dérèglement climatique que le CO2. Pour ne rien arranger, l’énergie grise produite par la transformation du gaz naturel en GNL est considérable.

Le Tadjikistan plus fort que la Fifa

Il n’y a pas le droit de manifester au Tadjikistan, ex-république soviétique nichée aux confins du Pamir. À moins que la cause en vaille la peine… Le 21 février, 10 000 personnes ont défilé dans les rues de Duchambé, la capitale. Un message envoyé au monde pour « faire adopter par les Nations unies la journée mondiale du football ». La proposition émane de Roustam Emomali, président de la Fédération tadjike de football. Ce monsieur n’est pas n’importe qui : il est le fils du président Emomali Rakhmon, président de la Fédération de football d’Asie centrale, président du Parlement tadjik, maire de la capitale Douchambé et ancien joueur professionnel de football. Le football est de venu une affaire sérieuse au Tadjikistan, depuis que l’équipe nationale a atteint les quarts de finale de la Coupe d’Asie 2024, pour sa première participation.

La bibliothèque de Charles Darwin

Après dix-huit ans de recherches, des archivistes sont parvenus à reconstituer l’intégralité de la bibliothèque personnelle du naturaliste britannique Charles Darwin. Parmi elles, les notes de voyage sur le HMS Beagle, à bord duquel il a entrepris en 1831 un périple de cinq ans qui le mènera de l’Amérique du Sud jusqu’en Australie. Le projet, The Complete Work of Charles Darwin Online, recense 7 400 titres, comprenant des livres, des brochures, des journaux, des documents intimes, des correspondances épistolaires qui témoignent de l’éclectisme de ses recherches et son intérêt pour les travaux des autres scientifiques. Darwin possédait des livres sur la biologie, la géologie, la philosophie, la religion, l’art, l’histoire, les voyages. La plupart d’entre eux étaient écrits en anglais, mais les archivistes ont aussi retrouvé des livres en allemand, en français, en danois, en néerlandais, en espagnol ou en latin. Auteur de L’Origine de des espèces, Darwin a le premier théorisé l’évolution des espèces qui a révolutionné la science.

Grève historique au Machu Picchu

Il n’y a pas que la tour Eiffel qui s’est mise en grève. Le Machu Picchu aussi. En voyant la masse de visiteurs qui afflue chaque jour au Machu Picchu, on aimerait être Hiram Bingham, découvrant en 1911 le site oublié envahi par la jungle. Un siècle plus tard, le complexe archéologique construit au XVe siècle accueille 4 500 visiteurs par jour. Une telle affluence a poussé le gouvernement péruvien à solliciter une entreprise privée pour la gestion de la billetterie.  Une décision que les habitants environnants voient d’un mauvais œil, considérant que cet accord constitue un premier pas vers la privatisation du site. Six jours de grèves majeures, en janvier, ont forcé la ministre de la Culture, Leslie Urteaga, à renoncer. Le site a, depuis, rouvert ses portes. 

Dessin du Machu Picchu par Perceval
© Perceval

Une nouvelle histoire

En janvier, l’information n’a certainement pas échappé aux archéologues que nous avons publiés dans Bouts du monde Numéro 57. Wellington Lage a découvert des ossements humains, des tessons de céramiques et des outils en pierre à Sao Luis, dans le Nord-Est du Brésil. On aurait été drôlement fiers de raconter ces quatre années de fouilles et ces découvertes grandioses : 43 000 squelettes humains et 100 000 objets anciens qui dormaient à deux mètres de profondeur sur un site recouvert par la végétation tropicale et grignoté par le tissu urbain. Les scientifiques y ont découvert des céramiques rudimentaires, laissées là 9 000 ans auparavant. Ces découvertes réécrivent l’histoire du Brésil où les premiers humains seraient arrivés 1 400 ans plus tôt que ce qui semblait établi.

Le souvenir de Jean Malaurie

Mars 2015. Un coup de téléphone pendant le salon du livre de Paris. Au bout du fil, l’assistante de Jean Malaurie. Elle nous propose de publier des carnets du scientifique. On n’aurait pas osé solliciter le fondateur de la collection « Terre humaine ». L’ethnologue est décédé le 5 février, sans que nous ayons eu le privilège de le publier. Son assis tante nous a informés des raisons de son refus : Jean Malaurie voulait publier des travaux scientifiques et cela ne correspondait pas à la ligne éditoriale de Bouts du monde. Passés les regrets, on y a vu un beau message : à 93 ans, l’ethnologue, auteur des Derniers Rois de Thulé, avait encore des choses à expliquer, à transmettre. Finalement c’est un autre assistant de Jean Malaurie que nous avons publié six ans plus tard, dans Bouts du monde Numéro 47, Norbert Rouland nous racontait comment le scientifique avait accueilli avec bienveillance une lettre de candidature au Centre des études arctiques dans laquelle il expliquait qu’il était assez bon… skieur.

« Le plus grand mystère de l’aviation de tous les temps »

« C’est le plus grand mystère de l’aviation de tous les temps », dit carrément Tony Rome, un explorateur australien qui assure avoir découvert l’avion d’Amelia Earhart, un Lockheed 10-E Electra qui s’est abîmé en 1937 au-dessus de l’océan Pacifique alors que l’aviatrice américaine avait entrepris un tour du monde en avion. « Il serait difficile de me convaincre qu’il s’agit d’autre chose que d’un avion, premièrement, et deuxièmement, qu’il ne s’agit pas de l’avion d’Amelia. Il n’y a pas d’autres crashs connus dans la région, et certainement pas de cette époque, avec ce type de design et la queue que l’on voit clairement sur l’image », a-t-il raconté en janvier à la télévision australienne NBC. Amelia Earhart a été la première femme à traverser l’océan Atlantique en solo.