Carnet de voyage - Pierre-Martial Cibot à la cité interdite de Pékin
Carnet de voyage - Chine

Un aïeul à la Cité interdite

Ce n’est pas un hasard si Laurent Cibot a effectué une partie de sa carrière professionnelle en Chine. Quand il était enfant, son grand-père lui parla d’un ancêtre, Pierre Martial Cibot qui avait vécu derrière les murs rouges de la Cité interdite à Pékin : Pierre-Martial Cibot, missionnaire jésuite, a vécu vingt ans à la cour impériale de Chine, entre 1760 et 1780, sous l’empereur Qianlong.

– EXTRAIT –

La première fois que j’ai entendu parlé de lui, j’étais petit garçon. Mon grand-père avait fait réaliser un arbre généalogique de notre famille. Un jour, il a décidé de me montrer ce « grand livre de la famille Cibot » dans sa bibliothèque. En suivant les liens entre nos ancêtres, il a cheminé jusqu’au nom de Pierre-Martial Cibot.
Tout de suite, j’ai été fasciné. Je ne savais sans doute pas encore où se trouvait la Chine mais cela me faisait espérer un monde à parcourir, des aventures à vivre. Depuis lors, je me suis intéressé à la Chine, son histoire, ses rencontres avec les autres cultures… Je me suis alors plongé dans les écrits de mon ancêtre. En découvrant ses textes, je me suis retrouvé à la cour de l’empereur de Chine au XVIIIe siècle. Observateur invisible et muet, Pierre-Martial Cibot offre des descriptions précises des rituels, des modes de vie. Il y indique les différentes formes des sciences et des pratiques. Il fallait que j’en sache plus… Cette curiosité a été le premier moteur de ma quête d’informations sur mon ancêtre.

Pierre-Martial Cibot, jésuite français, originaire de Limoges, embarque à Lorient le 7 mars 1758, sur le navire d’Argenson qui faisait partie d’une escadre de neuf vaisseaux de guerre armés. Il fera une escale au Brésil (Rio de Janeiro), puis dans les îles de France et de Bourbon (île Maurice et île de la Réunion) avant d’arriver à Macao le 25 juillet 1759. Après avoir passé seize mois en mer, Pierre Martial Cibot passe plusieurs mois à Macao et décide de voyager par voie terrestre jusqu’à Pékin. Il passe les portes de la cité impériale le 7 juin 1760 et retrouve les autres jésuites de la Mission française de Pékin. Pendant vingt ans, il restera au service de l’empereur Qianlong (1735-1796), le « Fils du ciel ». Au cours de ces années, il partagera son temps entre sa mission apostolique, ses travaux pour l’empereur et ses écrits, contenus dans le recueil « Mémoires concernant les Chinois » publié en dix-sept volumes, entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle. Il passait une partie de son temps à construire, pour l’empereur, des horloges mécaniques et à dessiner des jardins.

J’hésite, sans doute, une fraction de seconde, tant je suis assailli par des milliers de questions. Que vais-je trouver ? Suis-je sûr de l’emplacement ?

Il y a quelques années, je suis arrivé à Pékin. Ma carrière débutait, je devais prendre mes fonctions à la Mission économique de l’ambassade de France. Pas le temps de faire du tourisme, de m’attarder dans les rues de cette nouvelle capitale. Il fallait construire ce nouveau job, mettre en place les éléments de mon nouveau quotidien, comprendre le monde diplomatique. Ce n’était pas le moment pour explorer de manière touristique Pékin, ni même de partir en quête de la tombe de mon illustre ancêtre. J’avais donc relégué cette quête dans les choses lointaines à accomplir.
Mais au fil des jours, au fil des missions, le besoin pressant de trouver des réponses s’est fait sentir. Sur un coup de tête, une après-midi, je décide de quitter le bureau pour me rendre au cimetière des Jésuites. Mon cœur palpite, je trouve un taxi. Une vingtaine de minutes plus tard, le chauffeur se retourne vers moi et me dit : « C’est ici ! Nous y sommes ! ». J’hésite, sans doute, une fraction de seconde, tant je suis assailli par des milliers de questions. Que vais-je trouver ? Suis-je sûr de l’emplacement ?

Récit de Laurent Cibot à découvrir dans la revue Bouts du monde Numéro 53

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